jeudi 13 août 2009

Le crash de Roswell, confirmé par de nouveaux témoins



Le crash de Roswell,
confirmé par de nouveaux témoins


Gildas Bourdais, mise à jour, Août 2009


Depuis la parution en 2004 de mon livre Roswell. Enquêtes, secret et désinformation, le dossier s’est enrichi de nouveaux témoignages qui permettent de cerner de plus près le déroulement de l’événement, au cours des premiers jours de juillet 1947. Une étape importante dans cette voie a été le livre de Tom Carey et Donald Schmitt, Witness to Roswell, paru en juin 2007, auquel s’ajoutent d’autres sources, notamment les livres de Kevin Randle et du Dr Marcel Jr. Carey et Schmitt ont proposé dans leur livre un nouveau film des événements (« time line »), qui représente un gros progrès par rapport aux ouvrages précédents, mais qui comporte encore, à mon avis, quelques difficultés. J’en ai discuté avec les auteurs, et je leur ai suggéré de légères modifications, tenant mieux compte des témoignages. Donald Schmitt a fini par me dire, en septembre 2008, son accord sur mes suggestions. C’est ce scénario remanié que j’ai retenu dans la nouvelle édition de mon livre, publié en février 2009 sous le titre Le crash de Roswell. Enquête inédite (JMG, Le Temps Présent).


Ce scénario est développé principalement dans le chapitre VI : « Nouveaux témoins et scénario révisé ». Il intègre de nombreux témoignages, anciens et nouveaux, comme les pièces d’un puzzle dont l’image générale apparaît de mieux en mieux. Je pense qu’il va surprendre plus d’un lecteur, tellement il a gagné en précision. En voici un bref résumé. Aussi étonnant que cela puisse paraître, depuis la parution de mon livre en février 2009, quelques nouveaux témoins ont été encore dévoilés, notamment dans une nouvelle édition du livre de Carey et Schmitt parue en juin, dont j’ai tenu compte dans ce scénario.



Mercredi 2, ou Jeudi 3 juillet 1947, au soir

Orage violent dans la soirée du mercredi 2, ou du jeudi 3 juillet (le débat reste ouvert sur la date exacte). Le fermier William « Mack » Brazel, éleveur de moutons au ranch Foster (situé à environ 100 km au nord-ouest de la ville de Roswell, à vol d’oiseau), entend une forte explosion, différente du tonnerre.



Jeudi 3 ou Vendredi 4 juillet

Découverte du champ de débris, et de plusieurs cadavres près de celui-ci

Le matin du jeudi 3 ou du vendredi 4 juillet, Brazel, en conduisant son troupeau de moutons, découvre le champ de débris à environ 16 km (10 miles) de sa maison, en compagnie de Timothy « Dee » Proctor, un fils des voisins Proctor, âgé de sept ans, qui l’accompagne souvent à cheval. Puis il découvre aussi, toujours avec Timothy, un site avec des cadavres, à 4 km (2 miles et demi) à l’est du champ de débris. Ils sont abîmés et sentent très mauvais. Les témoignages sur cette découverte sont indirects et, pour cette raison, elle a été laissée longtemps de côté par les enquêteurs. Ce sont : Loretta Proctor, la mère de Dee ; Sydney « Jack » Wright, qui était un camarade de Dee ; le journaliste Frank Joyce auquel Brazel en a parlé au téléphone dès le dimanche 6 à Roswell. Sydney, fils d’un employé du ranch Richards (situé au sud du ranch Foster), a témoigné en 1998 qu’il avait vu lui aussi ces cadavres, en présence de Mack Brazel. Selon lui, Brazel était très impressionné par cette découverte. Appelons ce site «  le troisième site » pour bien le distinguer du « deuxième site », plus proche de Roswell, où ont été découverts un ovni et des cadavres.


La photo de Brazel par Robin Adair le 8 juillet à Roswell


Dee Proctor et des camarades retournent sur les deux sites du ranch Foster, à l’insu de Brazel, et y ramassent des débris. Ce sont Sydney « Jack » Wright, deux fils du rancher Thomas Edington, et l’une des filles du rancher Truman Pierce. Il semble qu’il y ait eu d’autres visiteurs, dès le vendredi (ou le jeudi ?), car des débris auraient même circulé au rodéo du vendredi 4 juillet (jour de fête nationale), à Capitan, bourgade située à une heure de route au sud-ouest du ranch Foster. Pour cette raison, il paraît plausible que le crash ait eu lieu dès le mercredi-soir 2 juillet.

Brazel rend visite à ses voisins les plus proches, Floyd et Loretta Proctor, dont le ranch est à environ 16 km (10 miles) du sien, et leur montre des débris. Brazel, habituellement calme et réservé, est très excité par sa découverte. Il leur propose d’aller voir le site. Sur le moment, les Proctor ne veulent pas se déplacer, mais Floyd ira plus tard voir le terrain et y ramassera des débris, qui seront ensuite récupérés par l’armée. D’autres voisins viennent voir le champ de débris : Budd Eppers, Truman Pierce, Glaze Sacra. Les parents de Danny Boswell, qui ont un ranch à 40 km (25 miles) à l’est, viennent voir aussi. Tous ramassent des débris, qui seront ensuite récupérés, sans ménagement, par l’armée.

Brazel se demande comment nettoyer le champ de débris, que les moutons refusent de traverser. Le samedi 5 juillet, Il va à la petite ville de Corona, située à 50 km (32 miles) à l’ouest du ranch. Il y montre des débris à son oncle Hollis Wilson, aux patrons du Wades’s Bar, et à l’épicerie, la General Store. Voulant résoudre son problème, il montre également des débris à son ami policier Robert Scroggins, qui lui conseille d’aller voir les militaires à Roswell. Un nouvel élément intéressant est apparu récemment, dans la seconde édition du livre de Carey et Schmitt. A Corona, Brazel avait téléphoné aux propriétaires du ranch, les frères H.et J.B. Foster, vivant au Texas, pour leur apprendre son extraordinaire découverte. Deux témoins le confirment : l’ancienne épicière de Corona, Geraldine Perkins, qui avait à l’époque l’unique ligne téléphonique, et une fille de J.B. Foster, Jo Ann Purdie. Celle-ci a précisé que son père n’en avait jamais parlé publiquement car il avait été menacé lui aussi, comme Brazel, par les militaires.

Un point à souligner, important pour comprendre le déroulement de cette histoire, est que, dès le début du week-end, pas mal de gens des environs sont déjà au courant des débris étranges, et en ont ramassé. De plus, personne n’a identifié des ballons météo, et cibles radar montées sur baguettes de balsa, matériels banals qu’ils connaissaient bien, mais qui constituent encore aujourd’hui l’explication de l’armée de l’Air américaine.



Dimanche 6 juillet

Le fermier Mack Brazel vient à Roswell avec quelques débris. Les routes ne sont pas toutes goudronnées - il y a même une trentaine de km de chemin de terre plus ou moins cahotants - et le trajet, d’environ 160 km au total (cent miles), dure trois heures avec sa vieille voiture. Il montre ces débris au shérif George Wilcox, qui appelle aussitôt la RAAF (Roswell Army Air Force), la base des bombardiers B-29 située juste au sud de la ville. Des officiers viennent rapidement, examinent les débris et retournent à la base avec Brazel.

Auparavant, Wilcox a passé Brazel, au téléphone, au jeune journaliste Frank Joyce, de la radio locale KGFL, qui se trouve venir aux nouvelles à ce moment-là. Premier entretien de Brazel avec Joyce, à qui il révèle avec émotion avoir découvert des corps étranges : « Ils ne sont pas humains ! » (« They are not human ! »). Joyce finira par révéler cet entretien en mai 1998.


Franck Joyce en 1998


Dès le dimanche-soir, Brazel repart au ranch Foster avec le commandant (Major) Jesse Marcel, responsable de la sécurité de la base, et le capitaine Sheridan Cavitt, responsable du contre-espionnage, sur ordre du colonel William Blanchard. Celui-ci informe aussitôt de la découverte sa hiérarchie, sur la base de Carswell, près de Fort Worth au Texas, laquelle informe à son tour le Pentagone à Washington. C’est à Fort Worth que se trouve le quartier général de la 8ème Armée aérienne, dirigée par le général Roger Ramey, et son adjoint, le colonel Thomas DuBose.

A Fort Worth, le colonel DuBose reçoit l’ordre du général de division aérienne (Major General) Clements McMullen, commandant adjoint du Strategic Air Command, d’envoyer immédiatement à Washington des débris, dans un sac scellé. C’est le premier vol Roswell – Fort Worth, avec le lot de débris apportés par Brazel, dès le dimanche-soir. Le colonel DuBose supervise à Fort Worth le transfert sous sac scellé pour livraison d’urgence à Washington, confié au colonel Al Clark, commandant de la base de Carswell. Un premier lot de débris est donc examiné au Pentagone dès le matin du lundi 7, ce qui va provoquer une série de réactions en haut lieu.



Lundi 7 juillet

Marcel et Cavitt au champ de débris

Le commandant Marcel et le capitaine Cavitt inspectent le champ de débris toute la journée, et ils retournent le soir à Roswell.

Marcel est resté plus longtemps sur le site, et passe chez lui très tard en revenant. Il montre des débris à sa femme Viaud et à son fils, Jesse Marcel Jr., alors âgé de onze ans et demi. Celui-ci va devenir, quarante ans plus tard, un témoin direct important sur les débris. En août 2007, la chaîne SciFi a révélé un nouveau témoin sur cet épisode : l’ancien lieutenant Jack Trowbridge, qui était membre du service de sécurité de Marcel. Il raconte qu’il jouait au bridge avec des collègues quand Marcel est revenu du ranch Foster, et leur a montré des débris. Remarquons que ce nouveau témoignage n’est pas tout à fait cohérent avec ceux des Marcel, père et fils. Le Major Marcel a dit, et son fils l’a confirmé, qu’il avait réveillé sa femme et son fils à une ou deux heures du matin pour leur montrer des débris, étalés dans la cuisine. Mais il ne leur a peut-être pas dit qu’il était passé d’abord les montrer à ses collègues et amis.

Pendant ce temps, dans la journée du lundi, Walt Whitmore Sr, patron de la radio KGFL à Roswell, alerté par son journaliste Frank Joyce, envoie quelqu’un chercher Brazel sur son ranch, le reçoit chez lui et enregistre son témoignage avec l’intention de le diffuser le lendemain. Il l’héberge pour la nuit, selon le témoignage du propre fils de Whitmore.

Le troisième site, avec des cadavres, près du champ de débris

Sur le « troisième site », situé 4 km à l’est du champ de débris, se trouvent deux ou trois cadavres, très abîmés, en voie de décomposition et sentant très mauvais. Il est très probable que le fermier Brazel a montré également à Marcel et Cavitt ce site proche avec cadavres abîmés, étant donné qu’il en avait déjà parlé la veille au journaliste Frank Joyce. Ce n’est pas une certitude, cependant, car son propre fils, le Dr Jesse Marcel Jr, en doute. Il me l’a dit encore en juillet 2007 lors d’un dîner à Roswell : son père ne lui en avait jamais parlé. Mais il y a d’autres témoins, proches du Major Marcel qui l’ont confirmé. Le sergent Herschel Grice, membre de l’équipe de Marcel en 1947, a dit que Marcel lui avait même décrit leur apparence physique, avec des visages blancs, d’aspect « caoutchouteux » (« white, rubbery figures »). C’est également Sue Marcel Methane, de la famille Marcel, qui avait recueilli cette confidence de Marcel peu avant sa mort. Il lui avait décrit des visages blancs et « poudreux » (« white powdery figures »).

Pour sa part, Marcel a fait comprendre plusieurs fois aux enquêteurs qu’il n’avait pas tout dit  (interview de Linda Corley en 1982 ; interview à la radio KOAT en 1985, un an avant sa mort). Ce qu’il a toujours dit, en revanche, c’est que le capitaine Sheridan Cavitt était retourné avant lui à la base, alors qu’il était resté plus tard pour continuer à étudier le champ de débris. Ainsi, il semble évident que Cavitt a alerté le colonel Blanchard dès son retour le lundi-soir, sur leur double découverte extraordinaire, du champ de débris et des cadavres non loin de là.

Il semble plausible, en tenant compte, on va le voir, d’autres témoignages sur la base, qu’il ait été décidé d’aller chercher ces cadavres au plus vite et de les rapporter à la base le soir même, malgré le risque sanitaire que cela impliquait. Le premier souci était déjà à ce moment-là, sans doute, d’imposer le secret sur cette extraordinaire découverte. Il était trop tard, ce lundi-soir, pour prendre le contrôle du vaste champ de débris, mais il était possible de retourner sur le terrain avec une petite équipe, guidée par Cavitt, pour récupérer d’urgence les cadavres. Plusieurs témoignages semblent le confirmer, notamment celui-ci, recueilli par Carey et Schmitt : le sergent LeRoy Wallace, de la police militaire, est appelé un soir pour aller à un site de crash aux environs de Corona, « pour aider à charger des corps ». Selon sa veuve, lorsqu’il est revenu le lendemain-matin, ses vêtements étaient imprégnés d’une odeur épouvantable, et elle les a brûlés. C’est aussi suggéré indirectement par le nouveau témoignage d’Eli Benjamin, que nous allons voir plus loin.

Selon ce scénario, les deux ou trois cadavres du troisième site, très abîmés, sont transportés à la base, dans des sacs hermétiques et dans un véhicule frigorifique. Ils sont déposés à l’hôpital, et ils font l’objet d’un premier examen le soir même. En effet, selon la veuve d’un chirurgien de l’hôpital, qui vivait sur la base, le colonel Blanchard avait appelé son mari pour une affaire urgente, vers 23 h 30. Il s’était absenté pendant une heure et demie et ne lui en avait jamais rien dit ensuite. Il est plausible qu’un premier examen ait été fait ce soir-là, mais c’est le lendemain-matin, mardi 8 juillet, qu’aurait eu lieu une première autopsie à l’hôpital de la base.

La découverte du deuxième site, plus près de Roswell : ovni, cadavres, et un survivant !

Le lundi-matin, une équipe d’archéologues découvre le deuxième site du crash, avec l’ovni, plus près de Roswell, à environ 60 km (40 miles) au nord de Roswell et 8 km (5 miles) à l’ouest de la route 285. Il faut environ trois quarts d’heures pour y aller par la route depuis Roswell. Ce n’est pas exactement le lieu qui avait été indiqué par Franck Kaufmann au début des années 90, témoin aujourd’hui discrédité. Selon les témoignages nouveaux recueillis par Tom Carey et Donald Schmitt, il est un juste peu plus au nord. Incidemment, ce site est à seulement 20 à 30 km à vol d’oiseau au sud-est du champ de débris. Tom Carey, lorsque je l’ai rencontré à Roswell en juillet 2007, m’a pointé le lieu exact sur une carte, mais c’est un détail qui reste confidentiel pour protéger ce terrain privé.

L’équipe d’archéologues découvre un petit engin de forme ovoïde, trois cadavres et sans doute un survivant ! L’un d’eux signale leur découverte par téléphone, au shérif de Roswell, en allant au hameau de Mesa sur la route 285 (soit une marche de huit à dix km pour y arriver). Les militaires arrivent dans l’après-midi sur les lieux, avec des pompiers. On a cru longtemps que c’étaient des pompiers de la ville de Roswell, mais selon un nouveau témoignage recueilli par Anthony Bragalia et Kevin Randle, c’étaient en fait des pompiers militaires de la base de Roswell. Selon ce nouveau témoin, lui-même ancien pompier de la ville, ceux-ci s’étaient vus interdire d’y aller par les militaires. Cependant, l’un d’eux, Dan Dwyer, y était allé quand même, avec sa voiture personnelle, en prenant sans doute de vitesse les militaires. Ceci explique le témoignage de sa fille Frankie Rowe, à qui il avait raconté ce qu’il avait vu : engin, cadavres, et un survivant. Cet épisode est en fait l’un des premiers à avoir été révélé, de toute l’histoire de Roswell, mais on croyait à l’époque que le site était dans la plaine de San Agustin, à l’ouest de la vallée du Rio Grande ! Les principaux témoins (voir au chapitre V de mon livre Le crash de Roswell) sont le Dr Bertrand Schultz, le Dr Curry Holden, qui dirigeait l’équipe archéologique, Mary Ann Gardner, et Frankie Rowe, fille du pompier Dan Dwyer.

Selon de nouveaux témoignages, retrouvés notamment par Carey et Schmitt, les archéologues n’ont peut-être pas été les seuls civils ayant découvert l’ovni et les cadavres. Ce serait le cas du père de Sue Farnsworth qui, selon elle, aurait été ensuite menacé. De même, selon George Cisneros, plusieurs voisins l’avaient vu et furent aussi menacés. Un autre témoignage civil, très intéressant, est celui d’un ingénieur de Boeing, Richard Loveridge, enquêteur sur les accidents d’avions. Il avait révélé à son fils, à la fin de sa vie, qu’il avait été sur le site et qu’il avait « tout vu » : l’ovni, les cadavres et le survivant !

Nouveaux témoins militaires, sur le deuxième site, avec l’ovni :

Plusieurs témoins militaires importants, permettant de préciser le film des événements, ont été révélés en 2007, notamment dans le livre de Tom Carey et Donald Schmitt, et dans des émissions de télévision comme celles de CNN (Larry King Live) et SciFi Channel (Voir mon livre Le crash de Roswell).

Le sergent Homer Rowlette faisait partie du 603ème escadron d’Ingénierie de l’Air (Air Engineering Squadron). Son fils Larry et sa fille Carlene Green (vidéos sur le site SciFi) ont dit ce qu’il leur avait révélé sur son lit de mort en mars 1988. Il avait fait partie de l’équipe de nettoyage déployée sur le site au nord de Roswell. Il avait eu en main l’une de ces feuilles controversées « à mémoire de forme » décrites par beaucoup. Plus important encore, il avait vu l’appareil, qu’il a décrit comme étant de forme « à peu près circulaire », et a dit qu’il avait vu « trois petits êtres » avec de larges têtes. Au moins l’un d’eux était vivant.


Le sergent Homer Rowlette (RAAF Yearbook)



Carlene Green, fille de Homer Rowlette (SciFi Channel)


Le soldat de 1ère classe (PFC) Roland Menagh était un autre MP (police militaire) sur le site, selon ses fils Michael et Roland Jr. Il leur a décrit un appareil en forme d’œuf et sans traces de soudure. Michael se souvient qu’il avait aussi décrit trois cadavres. Son père leur a dit qu’ils avaient chargé l’appareil sur un camion à 18 roues et recouvert d’une bâche (le lendemain mardi, épisode que nous allons voir plus loin). Il l’avait escorté avec une jeep, à travers la ville et jusqu’à la base, où l’épave avait été déposée dans un hangar.



Lundi-soir, et nuit du lundi 7 au mardi 8 juillet

Les militaires sont probablement arrivés assez tard sur le deuxième site, plus proche de Roswell. Il a fallu un certain temps pour qu’un membre de l’équipe d’archéologues aille à pied jusqu’au hameau de Mesa sur la route 285, pour téléphoner au shérif de Roswell. Il a fallu également du temps pour que les militaires arrivent sur le terrain. Mais le site était plus petit que celui du ranch Foster avec son vaste champ de débris, et ils ont été en mesure de le boucler rapidement, le soir même. Ainsi, contrairement aux cadavres du ranch Foster, non gardés, qu’il fallait récupérer au plus vite en dépit de risque sanitaire, il a pu être décidé de garder les cadavres sur le site, au moins pour la nuit, à l’abri d’une tente, bien gardée par des soldats armés.

Deux témoignages au moins indiquent cela, de soldats qui ont été chargés de garder cette tente. Selon des membres de leurs familles, le soldat Ed Sain et le caporal Raymond Van Why furent emmenés sur le site dans une ambulance, le soir du 7 juillet, pour garder une tente où se trouvaient les cadavres, et reçurent l’ordre de tirer sur toute personne qui essaierait d’entrer. Par contre, s’il y avait bien un survivant sur le deuxième site, ils ne le virent pas. Il semble très probable qu’il fut ramené le jour même à la base, sans doute à l’hôpital. Deux témoins indépendants l’auraient même vu entrer, en marchant, à l’hôpital.

Il faut dire ici que Tom Carey et Donald Schmitt ont supposé que cet épisode de la tente avait eu lieu, non pas sur le deuxième site proche de Roswell, mais sur le troisième site, au ranch Foster. Or cette option est contredite par le fait que ces deux soldats, chargés de garder la tente, ont dit qu’ils avaient vu l’ovni, qui était sur le deuxième site, plus proche de Roswell. De plus ils ont dit que le trajet n’avait guère duré plus d’une demi-heure sur la route, avant de s’enfoncer dans la « cambrousse » (« into the boondocks »). Cette durée du trajet correspond bien à l’emplacement du deuxième site. Dans un message qu’il m’a adressé en septembre 2008, Donald Schmitt m’a dit son accord à ce sujet, mais ils n’ont pas modifié ce scénario dans leur nouvelle édition de 2009.


Le caporal Raymond Van Why (RAAF Yearbook)


Donnons quelques précisions sur ces deux témoins importants. Selon Carey et Schmitt, en 1947, le soldat Ed Sain faisait partie du 390eme Air Service Squadron (ASS), lui-même rattaché au 509eme Groupe de bombardement, l’unique groupe de bombardiers atomiques de l’époque, basé à Roswell. Cet « escadron », dirigé par le Major Richard Darden, était chargé spécialement de garder les bombardiers B-29 du 509eme groupe. C’était une mission de confiance, et les soldats de l’ASS avaient une habilitation au niveau « top secret », plus élevée que celle de la police militaire, la 1395eme compagnie, dirigée par le Major Edwin Easley. C’est à celle-ci qu’appartenait l’autre témoin, le caporal Raymond Van Why. Selon Ed Sain, interviewé par Carey et Schmitt, les deux commandants Darden et Easley étaient déjà sur ce deuxième site de la plus haute importance, lorsqu’ils sont arrivés. Les deux soldats reçurent des provisions pour garder la tente la nuit, avec ordre de tirer sur toute personne essayant d’y entrer… Heureusement, personne ne se montra. Ils furent relevés avant même la fin de la nuit, et ramenés la base. Carey et Schmitt ont pu aussi s’entretenir avec le fils de Sain, Steven, qui lui a précisé que son père avait mis trente ans pour se décider à en parler, à lui et à son frère : « Il leur dit qu’il avait prêté serment de secret et qu’il craignait pour sa vie s’il disait quoi que ce soit… Il ne voulait regarder aucune émission, ni lire aucun livre sur Roswell. Ce n’est que récemment qu’il a commencé à en parler ». Il a aussi évoqué l’appareil, qui était « la chose la plus étrange qu’il avait vue de sa vie ».

Raymond van Why est décédé en 2001 à l’âge de 76 ans. Selon sa veuve Leola, il était très peu bavard sur les neuf années et demie qu’il avait passées dans l’armée. Il avait notamment gardé le B-29 Enola Gay (le bombardier d’Hiroshima). Lorsqu’il a quitté l’armée, il a jeté tous ses papiers militaires. Selon elle, il a parlé pour la première fois en 1954, en lisant un article de magazine sur un crash supposé d’ovni. « J’ai vu cela ! » s’est-il écrié. Il lui a raconté qu’il avait dû garder un site dans le désert, à Roswell, là où un engin spatial s’était écrasé. « Mon mari m’a dit que c’était bien un ovni qui s’était écrasé, que c’était un disque rond ». Comment le sais-tu ? lui avait-elle demandé. «  Parce que j’étais là et que je l’ai vu ! ».



Mardi 8 juillet

Le briefing du colonel Blanchard, et le communiqué de presse

Avant d’en venir à un autre épisode important, celui du transport à la base de Roswell de tout ce qui a été découvert – ovni, cadavres, débris, sur les trois sites - pour lequel de nouveaux témoins sont apparus également, il faut placer ici, chronologiquement, le briefing du colonel Blanchard, très tôt dès le mardi-matin, moment crucial où toute la suite des opérations va être décidée, certainement en liaison avec la hiérarchie militaire. Cet épisode, que l’on croyait bien connaître, a été fortement secoué par le témoignage posthume de Walter Haut, selon lequel le général Ramey et son adjoint le colonel DuBose étaient venus de Fort Worth pour y participer (voir le texte intégral de son affidavit dans Le crash de Roswell).

Le commandant Marcel et le capitaine Cavitt informent le colonel Blanchard, dès 6 h du matin, de ce qu’ils ont trouvé sur le ranch Foster (et sans doute dès la veille au soir pour Cavitt). Blanchard convoque son briefing hebdomadaire plus tôt que d’habitude, à 7 h 30. Il y fait le point de la situation sur les différents sites, avec plusieurs responsables de la base. Des débris rapportés par Marcel et Cavitt, qui participent eux aussi à la réunion, sont examinés. Le lieutenant Walter Haut y assiste aussi en tant que responsable de la communication

Dès la publication de l’affidavit de Walter Haut, dans le livre de Carey et Schmitt, un point a été débattu : la présence du général Ramey et du colonel DuBose à ce briefing. Sont-ils venus dès la veille au soir de Fort Worth (situé à 600 km, à une heure et demie de vol) ? C’est plausible, étant donné que toute la hiérarchie était déjà en alerte. Rappelons les signes d’agitation dans les hautes sphères militaires et politiques à Washington (évoqués au premier chapitre de mon livre Le Crash de Roswell). Si c’est bien le cas, Ramey et DuBose ont dû repartir dans la matinée de mardi pour Fort Worth, où ils ont « joué » la mise en scène au ballon météo pour la presse en fin d’après-midi.

Le communiqué de presse

Dans la matinée, le colonel Blanchard dicte au lieutenant Walter Haut le célèbre communiqué de presse annonçant la découverte d’un « disque volant ». Haut le diffuse vers midi aux deux journaux et aux deux radios de Roswell. L’annonce est aussitôt diffusée à la radio, et déclenche une tempête médiatique de portée internationale. Pourquoi le colonel Blanchard, officier d’élite promis à une brillante carrière (il deviendra général à quatre étoiles), a-t-il ordonné de publier ce communiqué étonnant ? Comme me l’a souligné Walter Haut quand je l’ai rencontré en 1995, il ne l’avait sûrement pas décidé tout seul. Ce communiqué a donc fait partie d’un plan d’action décidé au sommet. L’explication qui me semble la plus plausible est que cela a été décidé, dans la matinée, pour parer au risque de ne pouvoir garder totalement le secret, alors qu’il y avait trois sites sur le terrain dont seul le deuxième était sous contrôle à ce moment-là. Les militaires se rendent compte que la nouvelle du crash commence à se répandre dans la région. On dissuade la diffusion de l’interview de Brazel à la radio KGFL, et on bloque l’annonce du journaliste John McBoyle à la radio KAOT d’Albuquerque (selon le témoignage de Lydia Sleppy), mais un dérapage médiatique reste possible, et dans ce cas le communiqué permettra de faire bonne figure. L’essentiel est de cacher la découverte principale, celle de l’ovni sur le deuxième site. Si les militaires arrivent à boucler les trois sites et à tout bien contrôler sur le terrain, ils pourront revenir en arrière et démentir le communiqué. C’est exactement ce qui a été fait, le soir même, à Fort Worth, dans le bureau du général Ramey, et à Roswell aux radios et aux journaux.

Bouclage et nettoyage du champ de débris

Dès le début de la matinée, le colonel Blanchard envoie une équipe de 50 à 60 hommes pour boucler, puis nettoyer le vaste champ de débris au ranch Foster. Le mardi-matin, le directeur de la radio KGFL Walt Whitmore a amené à la base le fermier Brazel, qui avait passé la nuit chez lui. C’est sans doute Brazel, alors repris en main, qui va conduire les militaires pour aller sur le ranch et prendre le contrôle des lieux. Selon certains, il aurait même été emmené dans un avion d’observation pour les guider plus rapidement.

Le commandant Edwin Easley, chef de la police militaire, et le commandant Richard Darden, commandant adjoint de la base et chef de l’unité d’élite pour la garde des bombardiers atomiques, dirigent les opérations, sur les trois sites. Des MP de la 1395eme compagnie (dirigée par Ealsey) sont postés le long de la route 285 (au nord de Roswell) jusqu’au hameau de Ramon. Plusieurs témoins indépendants les ont remarqués, notamment William Woody et son père.

Des témoins civils ont observé de loin le bouclage du champ de débris. Trinidad « Trini » Chavez, fils d’un employé du ranch Richards (au sud du ranch Foster), a observé le travail des soldats sur le champ de débris, avec des camarades, à distance depuis une colline. Il était trop tard pour s’approcher et ramasser des débris, mais il a appris ensuite que son père en avait déjà ramassé. Le jeune Charlie Schmid, qui habitait au nord de la ville, a eu vent de l’événement. Il a enfourché sa moto et a réussi à s’approcher du champ du débris. Il a eu juste le temps de regarder quelques pièces métalliques, avec des inscriptions étranges. Mais, en entendant des véhicules militaires arriver, il a préféré s’éclipser, comprenant qu’il était tombé sur une affaire très secrète.

Le début de marche–arrière à Roswell

Dès mardi-matin, on l’a dit, la radio KGFL est fortement dissuadée de diffuser l’interview de Brazel, par deux coups de téléphone, depuis Washington. Ainsi, tout est déjà dirigé d’en haut. C’est le codirecteur de la station à l’époque,  George « Jud » Roberts, qui l’affirme : il a été appelé par le bureau du sénateur du Nouveau-Mexique Dennis Chavez, et par T. J. Slowie, secrétaire exécutif de la FCC (Federal Communications Commission). Celui-ci lui a fait comprendre que, s’il diffusait l’enregistrement de Brazel, sa radio risquait de perdre sa licence dans les trois jours ! John McBoyle, directeur de la station de la radio de Roswell KSWS, appelle Lydia Sleppy à Albuquerque (elle est le premier témoin dont a eu connaissance Stanton Friedman dans les années 70), et lui annonce la découverte de l’ovni. Mais l’entretien tourne court, et il lui dit d’oublier cet appel. La transmission à Los Angeles est arrêtée par un télex du FBI sur sa machine Télétype.

Dès le mardi-midi, l’armée a complètement bouclé les trois sites, et pense contrôler enfin la situation. Elle peut alors commencer à faire marche-arrière par rapport au communiqué de presse du matin. Sur le bouclage du site des débris, rappelons l’un des plus anciens témoins retrouvés par les enquêteurs. Budd Payne, éleveur des environs, avait voulu pénétrer sur le ranch de Brazel, à la recherche d’une bête égarée, mais il avait été arrêté par un garde armé. Il arrivait par l’ouest, ce qui veut dire que le ranch était déjà bouclé dans sa totalité. Que de précautions pour quelques kilos de ballons météo ! En début d’après-midi, quelques tentatives sont faites par les militaires de Roswell pour arrêter la diffusion du communiqué de presse. On va encore récupérer des copies le 9 juillet, à Roswell, Albuquerque et Santa Fé. Cependant, dès le mardi-matin, la rumeur de la découverte s’est déjà répandue à Roswell. Le communiqué de midi est publié par le Roswell Daily Record dans l’après-midi, ainsi que d’autres journaux du Centre et de l’Ouest des Etats-Unis (par exemple le San Francisco Chronicle). Les journaux de la côte Est publieront directement le démenti du soir, le lendemain 9 juillet. Rappelons également ici cette mise en scène à Fort Worth, avant de présenter les nouveaux témoignages, très importants, sur la récupération de l’ovni et des cadavres du deuxième site.

La mise en scène de Fort Worth, mardi-soir 8 juillet

Le général à la retraite Thomas DuBose a clairement dit, dans un « affidavit» signé en 1991, qu’ils avaient reçu l’ordre du Pentagone (le général McMullen), au quartier général de la 8eme armée aérienne à Fort Worth, de mettre en scène un cover-up et de tout oublier ensuite.

Le mardi en fin de matinée a lieu un vol de B-29 (Dave’s Dream) à Fort Worth, avec à son bord le Major Marcel et d’autres officiers. Marcel a pour mission d’apporter personnellement au général Ramey un nouveau lot de débris ramassés sur le ranch Foster. Equipage très galonné, selon le sergent-chef (Ms Sgt) Robert Porter, qui était à bord comme mécanicien de vol. A sa tête, le Lieutenant-colonel Payne Jennings, adjoint du colonel Blanchard (selon l’affidavit de Porter). Porter a eu en main des paquets de vrais débris, d’une surprenante légèreté. A Roswell, le lieutenant Robert Shirkey a assisté à leur départ.

Arrivé à Fort Worth, le commandant Marcel montre quelques débris au général Ramey, dans son bureau. Celui-ci l’emmène dans la salle des cartes pour qu’il lui montre le lieu précis du crash. Au retour dans son bureau, les débris ne sont plus là. Pendant ce temps, le colonel DuBose, adjoint de Ramey, réceptionne des débris de ballon météo et de cible radar très abîmés, livrés sans doute par un autre avion car il n’a pas vu Marcel, et va les étaler lui-même dans le bureau de Ramey. Pour lui, ce ne sont que des débris bons à jeter, selon ses entretiens avec des enquêteurs. Avant même l’arrivée des vrais et faux débris, le général Ramey, répondant à des journalistes, commence déjà à dire, en début d’après-midi, que c’est une confusion avec un ballon. Il annonce aux journalistes que le vol prévu vers la base de Wright Field (Ohio), pour examen des débris, est annulé. Mais un télex du FBI, à 16 h17 CST (qui sera rendu public sur demande FOIA), indique que non.

La célèbre conférence de presse au ballon météo a lieu vers 16 h 30 (CST). Le reporter photographe John Bond Johnson prend en photo Ramey et DuBose devant les débris étalés, qui seront publiées le lendemain. D’autres photos sont prises de Marcel, également devant des débris de ballon. L’adjudant Irving Newton, responsable météo convoqué au bureau de Ramey, identifie immédiatement ballon et cible radar, et est congédié. Sur ordre de Ramey, Marcel a assisté à la séance sans rien dire, contrairement à ce que racontera plus tard Newton, devenu un important témoin soutenant la thèse militaire des ballons (important car ils sont peu nombreux !). Le lendemain, le démenti de Fort Worth est publié en première page dans tous les journaux, et l’incident est clos pour trente ans. Mais à Roswell, et ailleurs, les opérations continuent.

Le démenti à Roswell

A Roswell, en début d’après-midi, de nombreux appels continuent à arriver de partout, mais le colonel Blanchard est injoignable. On dit qu’il est parti en congé ! En fait il est allé visiter les sites, selon le lieutenant-colonel Joe Briley. Les jours suivants, Blanchard se serait fait installer un bureau provisoire, à l’écart sur la base.

Le mardi après-midi, arrivée à Roswell des journalistes Robin Adair et Jason Kellahin, de l’Associatd Press. Témoignages contradictoires : Adair, venant d’El Paso par avion sur ordre urgent de l’AP à Washington, survole deux sites par avion. Des militaires en armes leur font signe de s’écarter. On montre à Kellahin, venu en voiture d’Albuquerque, des débris de ballons, près de la route 285. C’est manifestement une petite mise en scène arrangée spécialement pour lui. Nouvel entretien de Brazel le soir, aux deux journaux et aux deux radios, cette fois sous escorte militaire (témoignage de Paul McEvoy, éditeur du Record). Maintenant, Brazel dit qu’il a trouvé des débris de ballon le 14 juin, au lieu de début juillet. Sa femme Margaret, sa fille Bessie et son fils Vernon étaient avec lui. Brazel raconte maintenant qu’il avait trouvé en fait 5 livres de ballons. Mais alors, pourquoi s’est-il donné la peine de faire le voyage à Roswell ? Photo de Brazel par Adair, publiée le lendemain avec son témoignage modifié et le démenti de Fort Worth (article « Harassed rancher »…). Un nouvel épisode de probable manipulation des journalistes a été révélé en 2009 : un jeune photographe de Life Magazine, Alan Grant, a été embarqué à Albuquerque sur un petit avion par un Major Charles Philips qui l’a baladé dans un coin désertique, où ils n’ont rien trouvé : vous voyez, il n’y a rien ! De fait, Life, suivi par beaucoup d’autres magazines, ne va rien publier sur l’incident

Plusieurs témoins voient Brazel déambuler dans les rues de Roswell sous escorte militaire : Floyd Proctor, Lyman Strickland, Leonard « Pete » Porter, Bill Jenkins, et L. D. Sparks. Brazel, qui les connaît bien, baisse la tête et semble ne pas les voir. Second entretien de Brazel avec le journaliste Frank Joyce. Joyce lui fait remarquer qu’il a changé son histoire. Commentaire final de Brazel, très mal à l’aise, au moment de partir : « ils ne sont pas verts ! » Brazel est ensuite gardé près d’une semaine à la base, dans la maison d’hôtes (témoignages de sa famille et de ses voisins).

Cependant, des vols spéciaux, non programmés, commencent à arriver à Roswell : de Washington DC, de White Sands (Alamogordo AFB), de Fort Bliss (près d’El Paso), et de Kirtland AFB. On fait venir des équipes de nettoyage en renfort, depuis Fort Bliss et Alamogordo. Revenons maintenant au film des événements sur les sites et sur l’acheminement des débris, de l’ovni et des cadavres à Roswell, précisé par de nouveaux témoins.

Le mardi 8 matin, séance photo sur le deuxième site

A Washington, le Pentagone, alerté par Roswell et Fort Worth sur la découverte des deux sites, a décidé dès le lundi d’expédier par avion à Roswell une équipe de photographes : le sergent Frederick Benthal et le caporal Al Kirkpatrick, de la Anacostia Naval Air Station à Washington (Benthal avait photographié les tests atomiques de Bikini en 1946). Cet épisode de la séance photographique a été raconté aux enquêteurs par Benthal lui-même, en 1993.

Décollage de Washington vers 10 h, vol en B-25, arrivée à Roswell le lundi soir vers 17 h (MT). Au petit matin, Benthal et Kirkpatrick sont conduits sur le deuxième site. Ils doivent revêtir des tenues de protection. Ils voient des tentes, gardées par des hommes en armes, ainsi qu’un camion frigorifique. Kirkpatrick est envoyé sur un autre site : sans doute le champ de débris, que l’on est en train de boucler. Benthal voit s’affairer un certain nombre de soldats et d’officiers, dont deux commandants dont il ne connait pas les noms : sans doute les Majors Darden et Easley. Il doit faire des photos des cadavres, au flash sous la tente, où sont alignés des petits corps sur une toile en caoutchouc. Il remarque une odeur de désinfectant (formaldéhyde). Les deux photographes sont ramenés le jour même à la base de Roswell. Caméras et films confisqués. Retour le lendemain-matin à Washington, debriefing par le lieutenant-colonel Bibbey, et interdiction de parler. Peu de temps après, Benthal va être envoyé en mission en Antarctique !

Transport des cadavres à la base

Après la séance photo sous la tente, les cadavres du deuxième site sont transportés à la base, sans doute mardi en fin de matinée. Nous connaissons déjà un témoin probable de cette opération : le sergent Melvin Brown (selon sa fille Beverly Bean). Ils sont d’abord installés dans le grand hangar P-3 (qui existe encore aujourd’hui, sous le nom de hangar 84), puis une équipe est chargée de les transporter à l’hôpital de la base.

Voici un nouveau témoignage important, celui du soldat Elias « Eli » Benjamin qui, selon Tom Carey et Donald Schmitt, s’est décidé à parler en 2005. Jusque là, il n’osait pas, de peur de perdre sa pension de retraite militaire. Finalement, il a parlé publiquement pour la première fois, à l’âge de quatre-vingts ans, lors d’une émission de la chaîne câblée SciFi, qui a été diffusée en novembre 2006 aux Etats-Unis (en 2008 en France).


Eli Benjamin avec Richard Dolan et Lisa van Camp, au hangar P-3 (SciFi Channel)


Un matin de juillet, Eli Benjamin vient de terminer une garde de nuit, quand il reçoit l’ordre de rester en alerte pour une mission spéciale. Il remarque une activité importante et inhabituelle autour de quartier général de la base : c’est sans doute la fameuse réunion du mardi-matin. Dans l’après-midi, il reçoit l’ordre d’aller au hangar P-3. Lorsqu’il arrive au hangar, il découvre que l’officier qui lui avait dit de prendre ce poste est en proie à une grande agitation, et est contraint au silence par des MP : Il a craqué en voyant les cadavres dans le hangar ! Ceux-ci sont disposés sur des lits à roulettes (gurneys), trois ou quatre, croit-il se rappeler, et recouverts de draps. Benjamin est alors chargé, par un autre officier arrivé sur les lieux, d’escorter le transport de ces corps à l’hôpital de la base, dans une ambulance. Selon Benjamin, l’un d’eux semble se mouvoir. Le drap a glissé et il a aperçu un visage grisâtre, une large tête sans cheveux qui n’était pas humaine. Devant la caméra de SciFi Channel, Benjamin imite le mouvement de sa tête se penchant sur le côté, comme s’il était mourant.

Lorsque Benjamin arrive à l’hôpital, plusieurs médecins, et des officiers, sont là, attendant les corps. Ils enlèvent les draps, ce qui permet à Benjamin de les apercevoir furtivement. Il remarque que les médecins sont comme fascinés, immobiles, autour des cadavres. De mémoire, Benjamin fait la description d’un petit corps, avec une grosse tête en forme d’œuf, des yeux allongés, une bouche mince comme une fente, et deux trous à la place du nez.


La tête de l’alien selon Eli Benjamin (dessin de Don Schmitt)


Benjamin remarque aussi une très forte odeur de cadavres décomposés. Or cette odeur ne provient pas des corps qu’il vient d’acheminer. Ce détail suggère que les cadavres très abîmés du troisième site étaient déjà là, et semble confirmer le récit qu’une infirmière aurait fait à Glenn Dennis d’une tentative d’autopsie à laquelle elle aurait dû participer.

Un nouveau témoignage à l’hôpital

A l’hôpital, Miriam « Andrea » Bush, âgée de vingt-sept ans, était la secrétaire de l’administrateur de l’hôpital, le lieutenant-colonel Harold Warne. Selon son frère George et sa sœur Jean, elle est revenue un soir en état de choc. Elle a fini par dire qu’il y avait à l’hôpital du personnel médical qu’elle ne connaissait pas. Warne l’avait emmenée dans une pièce d’examen où elle avait vu plusieurs corps, petits comme des enfants. L’un d’eux était vivant. Leur peau était grisâtre ou tirant vers le brun, et ils avaient une grande tête et de grands yeux. Le lendemain, elle a déclaré que personne ne devait plus rien dire sur cette histoire. La famille a eu l’impression qu’elle avait été sévèrement menacée. Selon eux, l’événement l’avait tellement perturbée qu’il a gâché sa vie. Elle est morte en 1989 dans des circonstances suspectes, avec des traces de coups sur les bras, mais il a été conclu au suicide, en s’étouffant avec un sac en plastique noué autour de sa tête… Sa belle-sœur Pat Bush a témoigné publiquement (la vidéo a été publiée sur le site SciFi). Elle ne croit pas du tout au suicide, et est convaincue que Miriam avait été menacée.


Pat Bush, belle-sœur de Miriam Bush (SciFi Channel)


Rappelons le témoignage de l’ancien employé de pompes funèbres Glenn Dennis. Il a raconté qu’il avait été appelé par la base pour savoir s’ils disposaient de petits cercueils, hermétiques, et comment faire pour embaumer des corps. Il aurait ensuite rencontré une infirmière à l’hôpital qui lui dit avoir participé à une séance d’autopsie, interrompue à cause de l’odeur insupportable des cadavres. Son témoignage a été mis en doute car il avait caché le nom de l’infirmière en donnant de faux noms. Or une série de nouveaux témoignages ont permis de retrouver très probablement la véritable infirmière, Mary Crowley Lowe, qui habitait encore à Roswell en 2009 ! Wendy Connors, enquêtrice réputée lui a rendu visite à la demande de Carey et Schmitt. Elle n’a pas avoué vraiment mais l’entretien la désignait assez clairement.


L’ancienne infirmière Mary Crowley Lowe (photo W Connors)


Les corps sont ensuite amenés dans une chambre froide, située à mi-chemin entre le hangar et l’hôpital (ceci a été confirmé récemment à Carey et Schmitt par une personne qui y a travaillé dans les années 90, et a entendu parler de l’événement de 1947). Puis, ils sont ramenés dans le hangar P3 pour la nuit, où l’on a préparé un local à cet effet, et où l’on a fabriqué des caisses spéciales en bois pour leur transport le lendemain. Il s’agit là des corps du deuxième site, ramenés à Roswell en début d’après-midi. Les corps très abîmés du troisième site sont traités à part, comme on va le voir plus loin.

Mardi-soir : préparatifs pour le transport des corps du deuxième site.

Il y a plusieurs témoignages crédibles de soldats qui ont dû garder le hangar P-3 pendant la nuit de mardi à mercredi, et préparer des caisses pour le transport le lendemain. Certains soldats sont postés pour garder le hangar la nuit. Certains ont vu les cadavres. Parmi eux, le sergent Melvin Brown (selon sa fille Beverly Bean) est l’un des plus anciens témoins connus.

Il y a aussi le soldat Francis Cassidy qui a dit à sa femme, Sarah Mounce, qu’il avait vu les corps à l’intérieur. Autre témoin : selon sa veuve Wanda Lida, le caporal Robert J. Lida lui a dit qu’il avait gardé le hangar et observé à l’intérieur l’épave et de petits corps, que l’on préparait pour être expédiés. Ce sont encore le sergent Robert Smith et d’autres membres de la First Air Transport Unit (1st ATU) qui ont participé aux préparatifs.

Le lendemain, probablement, a eu lieu le chargement et le transport de ces corps, directement vers la base de Wright Field, à bord d’un quadrimoteur C-54 (Douglas DC-4 en version civile). Cet avion a été piloté par le capitaine Olivier « Pappy » Henderson (selon les témoignages de sa veuve Sapho Henderson, et de sa fille Mary Kathryn Groode).

Chargement et transport des cadavres du troisième site

Les cadavres du troisième site, que l’on a rapidement renoncé à autopsier à l’hôpital à cause de leur odeur très forte, sont entreposés pour la nuit dans une tente, placée à l’extrémité de la base, le plus à l’écart possible des bâtiments, et non loin des puits de chargement (« bomb pits ») des bombardiers B-29 pour les bombes atomiques, en vue de leur transport dès le lendemain-matin. Les encombrants cadavres, à évacuer au plus vite, ont peut-être transité eux aussi par la chambre froide, où on les a mis dans de la glace et dans des housses étanches, puis on les a installés dans une grande caisse en bois. Au cours de la nuit, cette caisse est placée dans le puits de chargement No 1, et est chargée dans la soute du B-29 « Straight Flush ». Deux soldats ont raconté comment ils avaient gardé l’avion pendant qu’on le chargeait sur le bomb pit. L’un d’eux a décrit comment le puits avait été entouré de deux toiles pour empêcher quiconque de voir à l’intérieur. Il avait dû monter la garde en aveugle entre les deux toiles (ces témoignages, qui se recoupent bien, sont détaillés dans Le Crash de Roswell).

Le compte-rendu le plus intéressant, peut-être, sur le chargement du B-29 est celui du capitaine Meyers Wahnee, selon sa fille Blanche Wahnee. Son père avait révélé à sa famille que l’incident de Roswell était véridique, dans la dernière année de sa vie. Officier de sécurité de haut niveau, il était venu à Roswell par avion de Fort Simmons, au Colorado, pour superviser le transport d’un « élément top secret », de Roswell à Fort Worth par un vol spécial de B-29. L’élément était une unique, grande caisse en bois, que Wahnee devait accompagner comme garde de sécurité dans le puits de chargement. Il dit qu’il contenait les corps d’aliens trouvés près de Roswell. Comme plusieurs autres témoins dans le livre, il a précisé qu’il y avait trois sites de crash.

Nous allons voir comment toute une série de témoins, dont certains sont nouveaux, ont décrit ce transport des corps par B-29 le lendemain mercredi, vers le quartier général de Fort Worth, au Texas. Mais, pour respecter la chronologie, plaçons d’abord ici l’épisode du transport de l’ovni à la base, le mardi après-midi, pour lequel il y a aussi de nouveaux témoins.

Chargement et transport à Roswell de l’ovni du deuxième site

Le mardi 8, pendant qu’est mis en scène à Fort Worth le démenti public au ballon, les opérations de récupération continuent sur les sites et sur la base de Roswell. Dès 5 h du matin, le sergent Earl Fulford voit son ami, le sergent George Houck, quitter la base au volant d’un camion avec une longue remorque. L’après-midi, vers 16 h, alors qu’il quitte son travail, il le voit revenir avec un chargement bâché sur la remorque, qui semble avoir la forme d’une Wolkswagen. Fulford lui a demandé ce qu’il transportait, mais Houck a toujours refusé de lui en parler.


L’ancien sergent Earl Fulford, invité à CNN


Le soldat Rolland Menagh a participé au chargement de l’ovni sur un camion remorque à 18 roues, recouvert d’une bâche. Il a escorté en Jeep le retour du convoi à Roswell, où l’engin a été déposé dans un hangar. Des témoins, en ville, voient passer le camion 18 roues, bâché, sous escorte armée. Ces divers témoignages indiquent bien que l’appareil a été rapatrié au hangar P-3 en fin d’après-midi.

C’est sans doute le lendemain mercredi que le capitaine Sheridan Cavitt est allé visiter le deuxième site, accompagné de son assistant, le sergent-chef Lewis Rickett. Celui-ci a raconté la visite, à trois quarts d’heure de route au nord de Roswell. Il n’a pas vu l’ovni, mais il y avait encore quelques débris au sol. Il en a ramassé un qui était légèrement incurvé et très léger, mais impossible à plier.

En 2009, encore de nouveaux témoins !

De nouveaux témoignages sur ces opérations ont encore été recueillis par l’équipe Carey-Schmitt, et cités dans leur seconde édition de 2009. James Strom, selon son beau-frère John Tilley, a escorté le convoi à travers Roswell en fin d’après-midi. Bill Blair a confirmé l’entreposage au hangar P 3. De nouveaux témoins confirment les rumeurs qui circulaient à la base sur le crash : les sergents Harvie Davis et Leonard Hardy, les soldats John Bunch et Eugene Helnes.

D’autres témoins militaires, directs ou indirects, ont encore été retrouvés : selon sa femme Mary, le soldat Frank Martinez a conduit des camions vers le ranch Foster pendant deux jours d’affilée. En juillet 2008, l’ancien sergent William Ennis, ami d’Earl Fulford (un témoin important de la première édition, décédé le 3 août 2008) qui était ingénieur de vol sur B-29, a fini pas avouer qu’il avait vu l’ovni et il a fait ce commentaire : « Il n’y avait pas de moteur ! Avant de m’en aller, je voudrais bien savoir. » les témoins sont maintenant si nombreux, sur toutes ces opérations, que l’on renonce à les compter !

Un témoin surprenant : le gouverneur adjoint Montoya.

Il faut signaler ici un épisode curieux, mais qui semble confirmé selon les enquêteurs, après de nombreux entretiens avec des témoins. Ce serait la visite sur la base du jeune gouverneur adjoint du Nouveau-Mexique, Joseph Montoya, un Américain « hispanique ». Celui-ci aurait vu les cadavres, qui venaient d’être transportés dans le grand hangar P-3. Kevin Randle et Donald Schmitt en avaient déjà parlé dans leur second livre, paru en 1994. Tom Carey et Donald Schmitt ont repris et développé cet épisode étonnant dans leur livre de 2007, sur la base d’une série d’entretiens qu’ils ont réussi à avoir avec des témoins, proches de Montoya, notamment Ruben Anaya, qui avaient été impliqués dans l’incident. Cet épisode pose quand même quelques questions qui sont discutées dans Le crash de Roswell).

Selon Ruben Anaya, le gouverneur adjoint Montoya était allé au hangar P-3 pour serrer la main à de jeunes soutiens politiques (les « montoyistas »). Il se trouve qu’il est entré dans le hangar juste après que des véhicules militaires y avaient apporté les cadavres et un premier chargement de débris, que des techniciens et des médecins commençaient juste à examiner. Il pouvait difficilement tomber plus mal, et il fut littéralement saisi de panique. C’est alors qu’il a appelé Ruben Anaya pour venir d’urgence le sortir de là en voiture. Anaya était bien connu à la base et a pu y entrer sans difficulté, puis en ressortir avec Montoya, celui-ci en état de choc. Après avoir absorbé des remontants chez les deux frères Anaya, il a pu leur raconter ce qu’il avait vu : des corps allongés sur des tables « qui n’étaient pas humains ! ». L’un d’eux était encore vivant car il l’a entendu gémir. Incidemment, il y a une scène analogue, fameuse, dans le film Roswell (avec l’acteur Martin Sheen), dont le directeur exécutif Paul Davids connait très bien les enquêtes sur Roswell, et a préfacé le livre de Carey et Schmitt.

Selon Montoya, les « petits hommes » furent embarqués vers l’hôpital juste avant qu’il quitte le hangar. C’est compatible avec le témoignage d’Eli Benjamin qui avait dû opérer ce transfert, sans doute dans l’après-midi. D’autre part, Montoya n’avait pas vu l’appareil dans le hangar, seulement des débris. C’est compatible également les témoignages, déjà cités, selon lesquels l’appareil aurait été acheminé à la base en fin d’après-midi. Incidemment, c’est alors que le colonel Blanchard, revenu à la base après sa visite du terrain, aurait fait une visite au hangar, flanqué de son fidèle lieutenant Haut, lequel a eu ainsi l’occasion de voir, brièvement, l’engin et des cadavres. On voit que les divers témoignages s’enchaînent et s’emboîtent, tels les morceaux d’un puzzle compliqué, de manière plausible.



Mercredi 9 et jours suivants

Le deuxième vol de B-29 vers Fort Worth

C’est le mercredi 9 juillet, vers 16 h, que décolle le bombardier B-29 Straight Flush, avec la grande caisse en soute, en direction du quartier-général de Fort Worth, au Texas. L’appareil est piloté par le capitaine Frederick Ewing, et c’est un vol sous haute protection, avec des gardes armés dans la soute : le vol aller se fait à basse altitude (4 à 5 000 pieds, soit 1 300 à 1 600 m), alors que le retour à Roswell se fera à l’altitude de vol normale (25 000 pieds, soit 8 300 m, la cabine étant pressurisée). Le Major Marcel est sur le vol de retour. Le plus ancien témoignage recueilli par les enquêteurs est celui du sergent Robert Slusher, membre de l’équipage, qui l’a décrit avec précision dans son affidavit du 23 mai 1993. D’autres témoins plus récents, membres eux aussi de l’équipage, sont le sergent Arthur Osepchook et le soldat Lloyd Thompson.


L’ancien sergent Robert Slusher (SciFi Channel)


Les récits des deux autres témoins de ce vol, le sergent Arthur Osepchook et le soldat Lloyd Thompson, corroborent bien celui de Robert Slusher, avec quelques détails révélateurs sur la nature exceptionnelle de ce transport de haute sécurité. Le sergent Osepchook était certain, comme les autres hommes, qu’il y avait quelque chose de très important dans cette caisse. Un aspect intéressant de son témoignage est qu’ils ils furent « débriefés » à leur retour à Roswell. On leur dit qu’il n’existait pas de « soucoupes volantes », et qu’il n’y avait pas eu de crash de l’une d’elles. Encore une fois, que de précautions pour une grappe de ballons ! Autre détail : Lloyd Thompson se souvient qu’avait participé au vol un médecin de la base, qu’il a reconnu car l’avait soigné la semaine précédente. Bizarre aussi, ce médecin embarqué pour un simple aller et retour à Fort Worth...

A l’arrivée à Fort Worth, un groupe de gens attendait l’avion sur le tarmac. L’équipage a entendu dans l’intercom le lieutenant Felix Martucci dire qu’il reconnaissait parmi eux un ancien camarade d’école, devenu entrepreneur de pompes funèbres (mortician), mais le capitaine Ewing lui a ordonné aussitôt de se taire ! Au retour à Roswell, le même Martucci a sans doute gaffé une seconde fois en s’exclamant : « Les gars, nous venons de faire l’histoire ! » (« Boys, we just made history ! »). Incidemment, Tom Carey et Donald Schmitt racontent qu’ils ont réussi à joindre Martucci au téléphone mais que, dès qu’ils ont abordé ce vol « historique », il a répliqué immédiatement qu’il ne savait rien et leur a raccroché au nez. Ils ont bien essayé de le rappeler un peu plus tard, mais il avait changé de numéro. Il n’est pas inconcevable qu’il ait écopé d’un sérieux avertissement à l’époque.

Transports de débris par plusieurs avions C-54, les jours suivants

Nous retrouvons ici le sergent Earl Fulford qui raconte qu’il a été réveillé à 2 h du matin (vraisemblablement dans la nuit du mercredi 9 au jeudi 10) et a reçu l’ordre d’aller au hangar P-3. Il était aussi opérateur de chariot élévateur, et c’est pourquoi on l’avait ainsi mobilisé. C’est aussi, peut-être, parce qu’il avait une habilitation au niveau « top-secret » : on préférait utiliser des hommes de confiance, et en nombre limité autant que possible. Il a dû charger une caisse en bois, de 7 pieds carrés, dans un avion C-54. Elle pouvait être manipulée comme si ce qu’il y avait dedans était très léger.

Il y a eu d’autres chargements et d’autres vols : selon Robert Smith (affidavit), il y a eu trois ou quatre vols de quadrimoteurs C-54. Il confirme un vol vers la base de Wright par le capitaine Henderson (il a vu son équipage), déjà évoqué plus haut. Selon ses proches, celui-ci avait transporté des corps, probablement ceux du deuxième site. Ces transports ont eu, selon les témoins, plusieurs destinations : White Sands, et Kirtland, puis Los Alamos par la route. Cette destination de Los Alamos a été révélée par un cousin de Robert Smith, membre des services secrets, Raymond de Vinney. L’envoi de débris pour étude à White Sands et à Los Alamos est logique. Ce sont des centres de recherche avancée de l’époque, pour les fusées et les bombes atomiques. Selon certains, des personnalités éminentes, comme Robert Oppenheimer pour le nucléaire, Von Braun pour l’espace, auraient été consultées. On a parlé aussi d’un transport à Washington : selon les témoignages du lieutenant-colonel Joe Briley et du sergent Lewis Rickett, un avion venu de Washington le mardi 8, avec à son bord du personnel du contre-espionnage (CIC, Counterintelligence Corps), était reparti le jour même avec un chargement de débris.

Le nettoyage des sites au cours des jours suivants

Au cours de jours suivants, les militaires de Roswell, aidés de renforts venus d’autres bases, notamment de Fort Bliss, situé plus au sud, près du Mexique, ont procédé à un ratissage à fond des sites. Le sergent Earl Fulford a aussi raconté que, le mercredi 9, il « avait été porté volontaire » pour faire partie d’une équipe de quinze à vingt hommes qui furent conduits sur le champ de débris de Brazel pour finir de nettoyer le site. On les avait dotés de sacs de toile et on leur avait ordonné de ramasser tout ce qui « n’était pas naturel ». Il a décrit une zone qui s’étendait sur des centaines de mètres et qui était, comme l’ont dit d’autres témoins, encerclée par des MP. Manifestement, le terrain avait déjà été nettoyé, car il ne restait pas grand chose, et l’on pouvait voir des traces de pneus de gros camions qui avaient dû servir à embarquer des choses. Il a trouvé seulement sept morceaux, et il a décrit, comme tant d’autres témoins, des feuilles « à mémoire de forme » (« memory foil ») qui reprenaient leur forme initiale après avoir été pliées.

Rappelons ici l’inspection, en septembre, de la région de Roswell par le professeur Lincoln LaPaz, assisté de Lewis Rickett, (voir le chapitre 2 du livre). LaPaz découvre une zone de terrain vitrifiée, à 5 miles au nord-ouest du champ de débris. Il confirmera plus tard à Rickett son opinion qu’il y a eu chute d’un engin extraterrestre. Il y aurait eu ainsi quatre sites plus ou moins alignés, du nord-ouest au sud-est : la zone vitrifiée (premier impact au sol ?) ; le champ de débris 5 miles plus loin (explosion d’une coque externe ?), le site des cadavres à 2 miles et demi du champ (une capsule de sauvetage ?) ; le site d’impact avec ovni et autres cadavres, à environ 20 miles plus loin.

Que s’est-il vraiment passé à Roswell ? Risquons ici un commentaire prudent sur toute l’affaire : nous sommes confrontés, manifestement, à une histoire complexe. En dépit de tous les témoignages accumulés, on voit qu’il y a encore des zones d’ombre et des inconnues. Mais ce n’est pas une raison pour tout mettre en doute. Beaucoup de pièces du puzzle sont déjà bien assemblées.

Témoins menacés, habitants surveillés

Les militaires ont également procédé la récupération du moindre débris ramassé par les habitants. Les maisons sont fouillées, saccagées, et les habitants sont menacés, même les enfants, selon le témoignage du photographe de Roswell, Jack Rodden. L’un des éleveurs de la région lui a raconté que ses trois enfants étaient rentrés de promenade très traumatisés, et avaient refusé de dire ce qu’ils avaient vu. Rodden a ensuite appris qu’ils en avaient vu trop, et que les militaires les avaient menacés et effrayés. D’autres parents ont raconté la même chose.

A Roswell même, Nous connaissons déjà le témoignage des filles du pompier Dan Dwyer, Frankie Rowe et Helen Cahill, sur des menaces de mort faites à leur famille. Nous connaissons aussi celui de Barbara Dugger, la petite fille du shérif George Wilcox, à qui sa grand-mère Inez avait révélé, peu de temps avant sa mort, les menaces de mort faites à son mari et à elle-même. Or, le cas du shérif fut peut-être encore pire, si l’on en croit les frères Anaya, évoqués plus haut comme témoins de l’expérience traumatisante de Joseph Montoya. Ils avaient eu la visite du shérif Wilcox, qui avait mission de mettre en garde et menacer les témoins. Ainsi, Wilcox aurait été forcé par les militaires de jouer ce pénible rôle, avant d’être menacé à son tour ! Ceci explique pourquoi cette histoire l’avait moralement brisé, selon les confidences d’Inez Wilcox à Barbara Dugger, et aussi l’un de ses adjoints, au point qu’il avait renoncé à sa carrière de shérif. Dans leur édition de 2009, Carey et Schmitt ont encore cité de nouveaux témoins sur les pressions et manœuvres d’intimidation dont furent victimes, à l’époque, les témoins.

Les jours suivants, au ranch Foster 

Les deux fils de Brazel, Bill et Paul, ont vu sa photo et le démenti dans les journaux. Comprenant que leur père a des problèmes, Ils accourent au ranch pour s’occuper des bêtes, chevaux et moutons. Paul, rancher au Texas, arrive le premier, mais les militaires sont encore là et il est refoulé, à plusieurs reprises. Il refusera totalement de témoigner par la suite. Le second, Bill, qui vit à Albuquerque, arrive juste après leur départ, avec sa femme Shirley, et ils peuvent s’occuper des bêtes. Brazel, à son retour, amer et humilié, refusera de parler à ses proches. Cependant, selon des témoins, il va avoir de quoi quitter le ranch et s’établir peu après à son compte.

Les habitants de la région ont continué à être surveillés et à être visités pendant des années. De fait, quelques-uns avaient gardé des débris. Bill Brazel va raconter, à Corona en 1949, qu’il a récolté quelques débris. Peu après, il a la visite d’un certain capitaine Armstrong, accompagné de trois soldats, qui demande et obtient les débris. Ils fouillent la maison et la mettent sans dessus-dessous. Selon un rancher de la région, L. D. Sparks, juste quelques années après l’incident, un voisin de Brazel, Dan Richards, lui avait montré un morceau de feuille métallique. Il l’avait jeté en l’air et ils avaient tiré dessus, mais sans arriver à l’endommager. On pouvait la replier mais elle reprenait ensuite sa forme originale : encore un témoin des feuilles infroissables, à mémoire de forme ! On verra, au chapitre 2 du Crash de Roswell, comment Brazel lui-même avait fait un jour cet exercice avec des amis chasseurs.

Malgré cet effort considérable des militaires pour récupérer tous les débris qui avaient pu être ramassés sur le ranch Foster et aux alentours (certains débris, les plus légers, avaient sans doute été dispersés à la ronde par le vent), il n’est pas impossible que des habitants aient réussi à en conserver quelques-uns. Tom Carey a dit à l’émission de CNN, Larry King Live du 4 juillet 2008, qu’il avait peut-être une piste pour en retrouver un !



dimanche 2 août 2009

Retour sur l'imposture des ballons Mogul



Gildas Bourdais, août 2009


Ayant déjà exposé longuement (trop longuement, m’ont dit certains) dans plusieurs livres et articles le dossier des « trains de ballons Mogul », mis en avant en 1994-95 par l’armée de l’Air américaine pour expliquer Roswell, mais réfuté ensuite par de nombreux arguments convaincants, je croyais pouvoir le laisser « reposer en paix », mais il s’avère que certains sceptiques le défendent encore, et même avec virulence. Aussi, je crois utile de récapituler ici, brièvement, les principaux arguments conduisant à écarter cette thèse des ballons qui, à y regarder de près, est une véritable imposture.

Résumé du débat.

Le 8 juillet 1947, alors que se déroulait la première vague d’observation de « soucoupes volantes » aux Etats-Unis, la base des bombardiers atomiques de Roswell, au Nouveau-Mexique, annonça par un communiqué de presse la découverte de l’un de ces mystérieux « disques volants », accidenté dans la région, sur le ranch du fermier William « Mac » Brazel. Mais, le soir même, la nouvelle était démentie par le général Ramey, commandant la région aérienne à Fort Worth, au Texas, en montrant aux journalistes des débris de ballon météo et de sa cible radar. C’était une simple méprise, expliqua-t-il, et l’incident fut aussitôt oublié.


Les débris de ballon et de cible radar montrés par le général Ramey à Fort Worth

Cependant, au début des années 1990, des témoignages ayant fait surface, de plus en plus nombreux, qui confirmaient le premier communiqué de presse de 1947, l’armée de l’Air a alors expliqué, en 1994-95, qu’elle avait en fait protégé le secret d’un « train de ballons » expérimental, appelé « Mogul », qui devait servir à détecter les futures explosions nucléaires soviétiques. C’était cela que les militaires de Roswell avaient pris pour une soucoupe ! Cette nouvelle explication est-elle plus crédible que la première ?
Rappelons d’abord que l’enquête de la commission du Congrès américain, le GAO, a refusé l’explication des ballons dans son rapport de juillet 1995, contrairement à ce qu’a écrit en France le sociologue Pierre Lagrange. Le GAO, ayant constaté la destruction non motivée d’une grande partie des archives de la base de Roswell, a seulement conclu : « L’enquête sur ce qui s’est écrasé à Roswell continue ». Les enquêtes ont continué, en effet. Au terme d’un long débat qui s’est déroulé au cours des années suivantes, les arguments se sont accumulés qui permettent d’affirmer que l’explication de l’Air Force ne vaut rien. J’ai participé activement à ces débats, et j’ai présenté les arguments en détail dans plusieurs livres et articles, auxquels je renvoie le lecteur désireux d’en savoir plus (1). Je ne fais ici que les résumer.
Voici, selon moi, les principaux arguments que l’on peut avancer contre Mogul :

- Les trains de ballons « Mogul », lancés depuis la base de White Sands, étaient composés d’éléments très ordinaires, ne pouvant nullement impressionner les officiers d’élite chargés des bombardiers atomiques ;

- Le train de ballons « Mogul » No 4, le seul censé pouvoir expliquer – selon les militaires - certains débris bizarres décrits par les témoins, n’avait même pas décollé, ayant été annulé à cause du temps couvert ! On peut en trouver les preuves dans le gros dossier d’un millier de pages, le Roswell Report , publié en 1995 par le Pentagone (2). De plus, aucun témoin de l’époque n’a décrit la récupération d’un train de ballons Mogul, avec ses équipements, sur le ranch du fermier Brazel ou dans les environs ;

- Des témoins militaires et civils, crédibles pour la plupart, ayant eu l’occasion de voir de près et de manipuler certains débris trouvés au sol sur les lieux du crash, ont décrit, de manière concordante, des débris étranges, très différents des débris ordinaires de ballons météo et de cibles radar ;

- Enfin, de nombreux témoins, retrouvés peu à peu par plusieurs équipes d’enquêteurs, racontent une tout autre histoire, celle de la découverte, encore très secrète aujourd’hui, non seulement d’un champ de débris étranges sur le ranch Foster du fermier Brazel, mais aussi d’un ovni accidenté et de plusieurs cadavres d’êtres non humains, sur un site plus proche de Roswell. Sur ce quatrième point, je renvoie le lecteur aux autres articles sur ce blog, en particulier à : « Le crash de Roswell – Le nouveau scénario » http://bourdais.blogspot.com/2009/02/le-crash-de-roswell.html

Reprenons ici les trois premiers arguments, qui suffisent, à eux seuls, pour réfuter Mogul.

1- Les trains de ballons « Mogul » : du matériel très banal

Le remplacement de l'explication initiale de l'Air Force - un ballon météo et sa cible radar - par cette nouvelle explication - un train de ballons météo « Mogul » avec divers équipements - appelle tout de suite une remarque de bon sens : vingt ou trente ballons, ce sont toujours des ballons ! Pour tenter de faire oublier cette lapalissade, les tenants de Mogul se sont efforcés de rendre ces trains de ballons impressionnants et mystérieux. Karl Pflock, l’un des premiers enquêteurs à lancer l’hypothèse Mogul, en même temps que l’Air Force au printemps 1994, décrit ainsi ces trains de ballons, dans son livre principal sur le sujet, paru en 2001 (3) : Ils étaient "énormes et complexes, s'étendant sur près de 700 pieds en vol, de haut en bas" (en fait, 600 à 650 pieds, soit 200 à 220 m). L’armée de l’Air américaine a publié l’année suivante son Roswell Report, dans lequel elle insiste également sur cette grande taille, avec un dessin comparant le train de ballons Mogul à la Tour Eiffel ! Cette comparaison est trompeuse. On trouve dans le Roswell Report de l’Air Force plusieurs schémas de trains de ballons, notamment des numéros 2 et 5, mais pas de Mogul 4 dont, apparemment, ils n’ont aucune trace dans les archives (on va voir pourquoi). Voici le schéma du train numéro 2, lancé sur la côte Est le 18 avril :


Schéma du train de ballons Mogul No 2 (Roswell Report)

En fait, les données techniques du rapport indiquent que le train complet, avec instruments, ne pesait pas plus de 25 kg. Avant de gonfler les ballons, on pouvait le transporter dans une jeep. La vraie question est celle-ci : à partir de combien de ballons météo, accrochées à une ligne, risque-t-on de les prendre pour une soucoupe volante ? Mais voyons de plus près les autres composants.


Lancer de ballons et cibles radar reconstitué pour une émission de télévision

Le train Mogul numéro 2, lancé en Pennsylvanie, avait servi de modèle pour les lancers prévus à White Sands, début juin 1947. Il comprenait 25 petits ballons météo en néoprène, pesant chacun 350 grammes, attachés à une ligne verticale en nylon de 650 pieds (200 m), et des cibles radar. Les ballons étaient distants de 20 pieds (6 m). L'ensemble était surmonté par trois ballons en néoprène de 1 000 grammes, qui servaient à assurer le décollage rapide et qui devaient être lâchés à partir de 45 000 pieds (13 700 m). Pour essayer de prolonger la durée des vols, les ingénieurs avaient eu l'idée d'accrocher un réservoir de ballast destiné à s'écouler lentement. C'était un réservoir rempli de kérosène, ou de sable, en plastique, avec une valve de relâchement automatique en fonction de la pression atmosphérique. Selon les modèles, il emportait environ de trois à cinq kilos de ballast. Pour alimenter ce matériel, il y avait aussi une batterie électrique. On a fait grand cas d'une autre pièce d'équipement, la "bouée acoustique" (sonobuoy), destinée à la détection des explosions à distance, qui aurait pu intriguer, dit-on, les aviateurs de Roswell. C'était un modèle marin comportant un hydrophone, un émetteur et sans doute une petite batterie électrique, d’un poids total de treize livres (6,9 kg). Mais la photographie de l'appareil montre un vulgaire tube métallique, long d'un mètre environ, cerclé ici et là, avec au sommet une petite sangle et une boucle métallique, bref, un matériel très ordinaire. Pas la moindre science-fiction là dedans.



Bouée acoustique (Roswell Report)


Un modèle de réservoir de ballast (Roswell Report)


Ces équipements sont décrits, avec schémas, photographies, fiches techniques détaillées, dans le volumineux Roswell Report. Cette abondante documentation est destinée, évidemment, à impressionner et à décourager la lecture. Mais si l'on ne perd pas son bon sens en route, il est flagrant que les composants de ces trains de ballons étaient des équipements parfaitement ordinaires, qu'on n'aurait pu manquer d'identifier comme tels. Il aurait suffi à quiconque d'identifier l'un quelconque de ces matériels - un ballon, une baguette de balsa des cibles radar (nous y venons tout de suite), une batterie, de la ficelle en nylon, une boucle métallique - pour régler la question. Seul l’objectif du projet, mettre au point un système de détection des futures explosions atomiques soviétiques, était secret. Même les personnels techniques n’en savaient rien.

Fragiles cibles radar

Le train de ballons numéro 2 était équipé de trois cibles radar, du modèle ML-307B, très légères et fragiles, d'un poids de 100 grammes seulement, ressemblant à des cerfs volants en forme de tétraèdre, avec des feuilles d'aluminium collées sur papier et montées sur des baguettes de balsa de 8 mm (5/16 de pouce) de section.


Le professeur Charles Moore montrant une cible radar


Des aviateurs chevronnés, responsables des bombardiers atomiques, pouvaient-ils prendre ces fragiles cerfs volants pour des débris de soucoupe volante extraterrestre ? Pour répondre à cette question, il n'en coûte qu'un Euro, le prix d'une baguette de balsa de 8 mm de section, achetée dans n'importe quel magasin de fournitures artistiques et de bricolage. Faites l'expérience, et voyez vous-même combien il est facile de casser une telle baguette dans ses mains. C'est vraiment très fragile. De même, amusez-vous à coller une feuille d'aluminium sur une feuille de papier, et voyez comme c'est facile à déchirer. Voyez également comme c'est facile à froisser, et pratiquement impossible à défroisser ensuite (contrairement aux feuilles infroissables décrites par des témoins, comme on va voir plus loin). Les deux officiers de Roswell envoyés sur le terrain, le lundi 7 juillet, pour inspecter le champ de débris, étaient parfaitement capables d’identifier ces débris. La commandant Jesse Marcel était le responsable de la sécurité de la base de Roswell, et le capitaine Sheridan Cavitt était responsable du contre-espionnage. L’année précédente, Marcel avait été félicité par toute la hiérarchie pour son excellent travail comme responsable de la sécurité des expérimentions atomiques à Bikini. Petit détail : son fils, le Dr Jesse Marcel Jr, a défendu sa mémoire contre des attaques assez ignobles des sceptiques, dans son livre The Roswell Legacy (2007). Il y a reproduit son diplôme de « radar intelligence officer » obtenu en 1945. Marcel n’ignorait rien des cibles radar !


Diplôme du commandant Marcel, pour « radar intelligence officers »


L’argument de la colle à bois
Mentionnons un curieux argument des sceptiques, comme Karl Pflock et le professeur Charles Moore, le physicien qui avait participé aux lancements à l’époque et qui était devenu dans les années 90 un ardent défenseur de la théorie Mogul, avec son livre UFO Crash at Roswell, paru en 1997 (4). Ils ont estimé que ces baguettes de balsa avaient été rendues peu reconnaissables car elles avaient été renforcées, non seulement avec du ruban adhésif, mais en les imprégnant de colle à bois. L'ingénieur Robert Galganski a fait une étude complète de la résistance des ces baguettes de balsa, y compris en les traitant de la sorte. Le résultat est sans appel : elles cassent presque aussi facilement (5). Pour ceux qui aiment les chiffres, les mesures faites dans les règles de l'art avec du matériel adéquat, ont donné les résultats suivants. La force à appliquer pour rompre ces baguettes de 8 mm est de 7,4 newtons pour une baguette non traitée, et de 17,4 newtons pour une baguette traitée avec de la colle à la caséine. Ce sont des forces faibles : un newton équivaut à 0,225 livre, ou 100 grammes.J'ai vérifié moi même qu'une baguette imprégnée de colle, bien séchée, est aussi facile à briser, et que le bois reste parfaitement identifiable car la colle s'enfonce dans le bois après séchage. Galganski a aussi fait des essais de combustion. Les baguettes, traitées ou non avec de la colle, ont commencé à brûler après une exposition de vingt secondes à la flamme d'un briquet. Or, rappelons-nous que le commandant Jesse Marcel, qui avait inspecté le terrain le 7 juillet ainsi que le rancher Brazel qui avait découvert le champ de débris, avaient essayé vainement de brûler les débris avec leur briquet. On le voit, l'argument de la colle à bois est une plaisanterie.
Nous pouvons déjà faire un premier constat. Si les aviateurs de Roswell avaient trouvé un tel matériel, il leur aurait suffi de ramasser l'une de ces baguettes et de la casser pour voir à quoi ils avaient affaire. Il n'y aurait pas eu de communiqué de presse, et pas d'affaire de Roswell. Il est invraisemblable que les aviateurs chevronnés de Roswell, triés sur le volet pour être responsables des bombardiers atomiques, aient pu prendre ces matériels d'une grande banalité pour des débris de soucoupe volante.

L’argument du « scotch à fleurs »
Cependant, nous ne sommes pas au bout de nos peines car les partisans de Mogul ont mis en avant les fameuses cibles radar, une pièce dont ils ont fait toute une histoire, pour la raison que celles de l'équipe de la New York University (NYU), chargée des essais, avaient une particularité : elles étaient renforcées avec du ruban adhésif décoré de motifs de fleurs stylisées. C’est cela, explique-t-on sans rire, que des témoins, tel le commandant Jesse Marcel, le responsable de la sécurité de la base de Roswell qui avait passé une journée à inspecter le terrain (et sur lequel sceptiques se sont acharnés), avaient pris pour des « hiéroglyphes » extraterrestres !
Reconnaissons-le et n’esquivons pas cette difficulté : Le fermier Mac Brazel et sa fille Bessie Brazel-Schrieber ont bel et bien décrit, le premier lors de son entretien du 8 juillet 1947 (sous escorte militaire), et sa fille dans sa déclaration sous serment du 22 septembre 1993, des débris de ballons, et très probablement de cibles radar, comme celles qui étaient lancées début juin à Alamogordo, avec ce détail révélateur du "scotch à fleurs", selon Brazel. L'article du Roswell Daily Record du 9 juillet cite Brazel : "une grande quantité de ruban adhésif scotch et une certaine quantité de ruban avec des fleurs imprimées dessus avaient été utilisées dans la construction" (Considerable scotch tape and some tape with flowers printed upon it had been used in the construction).
Ce n'est pas parfaitement clair, mais il faut admettre que Brazel avait bien fait mention de ruban adhésif avec des dessins de fleurs. A moins de supposer qu’il débordait d'imagination, il a bien cité là un détail "qui ne s'invente pas", et qui semble être, à première vue, un point en faveur de la découverte d'un train de ballons NYU. Soulignons cependant que c'est le 14 juin, alors que le communiqué de presse du 8 juillet parlait d’une découverte la semaine précédente. Je cite : « L’objet volant a atterri sur un ranch près de Roswell la semaine dernière ». Qu'avait donc trouvé Brazel, le 14 juin, c'est-à-dire au moins quinze jours pus tôt ? Le train de ballons Mogul numéro 4 ? Une hypothèse bien plus probable est celle de la découverte d'une simple grappe de quelques ballons météorologiques avec plusieurs cibles radar, qui ne l’avait d’ailleurs pas ému le moins du monde : on en trouvait assez souvent dans la région et ce n’était pas pour cela qu’il avait fait le voyage à Roswell le 6 juillet.
Le gros Roswell Report de l'Air Force mentionne clairement des lancements de grappes de ballons météorologiques par l'équipe de la New York University, au cours du mois de juin. Les rapports de NYU y sont reproduits et, dans celui couvrant le mois de juin 1947, on lit :
"Des essais sur le terrain ont été effectués sur la base aérienne militaire d'Alamogordo pendant la semaine du 1er juin, en utilisant des grappes (clusters) de ballons météorologiques. L'objectif premier de ces essais était de perfectionner le maniement et les techniques de lancement pour de grands assemblages, et de vérifier la mise en œuvre des dispositifs de contrôle de l'altitude mis au point pour ce projet".


Schéma d'une grappe de ballons de NYU (Roswell Report)

Karl Pflock donne plus de détails sur ces lancements non répertoriés, dans son deuxième livre sur Roswell, paru en 2001. A côté des "vols de service" avec tout l'équipement prévu pour les essais de type "Mogul", l'équipe de NYU effectuait aussi des lancements météorologiques, pour vérifier les vents avant les lancements de grands trains de ballons Mogul. Ces vols, précise Pflock, étaient des assemblages en grappe de trois à sept ballons en néoprène transportant de trois à cinq cibles radar ML-307B, attachées les unes aux autres comme la queue d'un grand cerf-volant. Le physicien Charles Moore utilisait plusieurs cibles car le signal de retour radar était trop faible avec une seule cible. Où ces grappes de ballons étaient-elles retombées ? On ne le sait pas. Ainsi, la question de savoir ce qu'avait trouvé Brazel, selon ses dires, le 14 juin, est bien plus incertaine que ne le disent les tenants du train de ballons Mogul N° 4.
Les sceptiques ne manquent pas de mettre en avant le témoignage de la fille de Brazel, Bessie Brazel-Schrieber, qui avait raconté qu'elle avait accompagné son père sur le terrain lorsqu'il avait ramassé des débris de ballons. Mais les enquêteurs, comme Kevin Randle, Donald Schmitt et Tom Carey, se sont rendus compte que sa mémoire était confuse et qu'elle mélangeait plusieurs incidents, comme je l'ai expliqué dans mon livre. De plus, dans leur dernier livre, paru en juin 2009, Carey et Schmitt révèlent (p. 79) qu'elle avait changé d'avis dans les dernières années de sa vie. Elle était arrivée à la conclusion que son père avait bien découvert quelque chose de très différent !

Aucun témoin n’a décrit la découverte d’un train de ballons Mogul

Un point important est à signaler ici : aucun témoin de Roswell n’a décrit la découverte, sur le ranch Foster du fermier Brazel, d’un train de ballons Mogul complet, avec ses équipements. Ni le fermier, ni sa fille Bessie, et pas davantage Marcel et son collègue, le capitaine Sheridan Cavitt qui avait inspecté avec lui le terrain, n'ont décrit les constituants des trains de ballons Mogul. Non seulement les instruments tels que radiosonde, bouée acoustique, batterie et réservoirs de ballast (nous allons y revenir) mais pas même la longue cordelette en nylon, à laquelle étaient accrochés les ballons, cibles radar et instruments.

Le physicien Charles Moore, qui avait fait partie de l’équipe de NYU, le reconnaît lui-même dans son livre de 1997, UFO Crash at Roswell, et propose une explication embarrassée :
"Apparemment, une grande partie de l'équipement transporté dans ce vol n'a pas été retrouvée. Brazel n'a pas dit avoir découvert de commutateur de pression, de microphone du type bouée acoustique (sonobuoy), ou le filin en nylon de 600 pieds auquel étaient attachés les ballons. Je soupçonne que les ballons restant (en état) dans le train ont décollé de nouveau et sont partis vers le nord-est, après que les cibles radar, les fragments de ballons déjà éclatés et les anneaux d'aluminium en bas du train aient été détachés par les vents de surface qui soufflaient sur le train après son premier contact avec le sol. Quoi qu'il en soit, aucune découverte des parties supérieures du train de ballons N° 4 n'a jamais été signalée".
De fait, rien de tout cela n’a été retrouvé dans les environs, et il n’y a donc pas la moindre preuve à l’appui de cette hypothèse.

Il y a un témoin qui avait tout vu : le capitaine Sheridan Cavitt, du service de contre-espionnage, qui avait accompagné le Major Marcel sur le terrain. Voilà l'homme qui est en position de trancher ce débat. Il est présenté dans le Roswell Report de l'Air Force comme témoin en faveur de l'hypothèse Mogul. Or, il n'en est rien. Cavitt indique assez clairement, dans son long entretien avec le colonel Weaver, qu'il n'a pas vu de train de ballons. Il n'a vu qu'un ballon météo et sa cible radar. Et, questionné par Weaver sur Karl Pflock, il s'offre le luxe de le qualifier de "notre meilleur debunker" ! Ce mot anglais est dérivé du verbe to debunk qui signifie démystifier, briser. Le debunker est donc le démystificateur, le briseur de mythes, mot très utilisé en ufologie. Drôle de témoin en faveur de Mogul, qui a passé la journée sur le terrain et n’a pas vu Mogul. Peut-être s’est-il refusé à s’associer à un nouveau mensonge, plus gros encore que le premier.
De son côté, Brazel dit, dans son entretien publié par le Roswell Daily Record du 9 juillet, que ce qu'il avait ramassé devait peser dans les cinq livres. C'est loin du compte pour un train de ballons Mogul, même délabré, comme le concède le professeur Charles Moore dans son livre. Le train numéro 5 pesait environ 25 kg, c'est à dire dix fois plus. Cette difficulté n'a pas échappé à Moore, qui a tenté de l'expliquer de la manière suivante :
« Brazel a déclaré avoir ramassé une quantité de caoutchouc "qui faisait un tas d'environ 18 à 20 pouces de long et 8 pouces d'épaisseur" (46 à 51 cm de long, 20 cm d'épaisseur). Trois à quatre ballons météo de 350 grammes auraient fourni une telle quantité de caoutchouc. Cependant, lorsqu'un ballon acoustique (de 350 grammes) éclate, tout ce qui revient sur terre avec sa charge utile (par exemple une radiosonde) est le col du ballon ».
Tout cela suggère, pour Moore, que Brazel avait trouvé le 14 juin des débris provenant d'une grappe de ballons qui aurait été quelque peu démembrée à l'atterrissage. Il note ensuite que, pour arriver à un poids de cinq livres, en comptant non seulement le caoutchouc des ballons mais aussi les autres éléments constituant un train de ballons, "il aurait suffi d'environ quatre ou cinq combinaisons de ballons et cibles".
Cela correspondrait bien à la découverte d'une petite grappe de ballons, et non pas d'un grand train de 25 à 30 ballons accrochés à une ligne de 200 mètres avec divers instruments. On voit que Moore se prend lui-même les pieds dans ses explications. Mais alors, où donc était passé le grand train de ballons Mogul 4 ? Nous allons voir maintenant que le débat est bien plus simple, car il n’avait même pas décollé.

2- Le train de ballons Mogul numéro 4 avait été annulé !

A part le témoignage de Brazel, et celui de sa fille, le seul document écrit qu'on a retrouvé pour tenter d'étayer l'hypothèse du vol Mogul N° 4 est le journal personnel du géophysicien Albert Crary, responsable des lancements de ballons à White Sands, fourni par sa veuve au professeur Charles Moore en 1994. Il est reproduit intégralement, pour cette période, dans le volumineux Roswell Report de l'armée de l'Air, et Charles Moore s'y est référé pour tenter de prouver que le vol Mogul Numéro 4 avait bien décollé. Or, Crary ne le dit pas du tout ! En voici les brèves phrases significatives qui indiquent tout le contraire :

"Mardi 3 juin. Debout à 2 h 30 du matin, prêt pour lancer de ballons, mais finalement abandonné à cause du ciel couvert.

Mercredi 4 juin. Dehors dans la montagne de Tularosa (au nord-ouest) et explosé charges de minuit à 6 h du matin. De nouveau, pas de vol de ballons à cause des nuages. Ai fait voler une bouée acoustique ordinaire (regular sonobuoy) avec une grappe (cluster) de ballons et j'ai eu de la chance avec le récepteur. Dehors avec Thompson l'après-midi au sol, mais médiocre par avion. Nous avons tiré des charges de 18 h à 24 h.

En revanche, Crary mentionne ensuite en ces termes le premier lancement réussi du train de ballons No 5, dans la nuit du 5 juin :
« Assemblage complet de ballons à altitude constante lancé à 5 h » ( Whole assembly of constant-altitude balloons set up at 0500 ). On voit bien la différence de rédaction : le lancement d’une grappe avec une bouée acoustique, dans la matinée du 4 juin, n’était pas du tout un train de ballons Mogul. Pour être précis, la bouée acoustique en question pesait 6,9 kg. Les ballons en néoprène, selon les données du Roswell Report, pouvaient enlever une « charge utile » de deux fois et demi leur poids. Un ballon de 1 000 grammes (un lifter) pouvait ainsi enlever 2,5 kg, et il suffisait de quatre ballons de cette taille, tout au plus, pour enlever la bouée acoustique.

Ainsi, si l'on s'en tient à la lettre du journal de Crary, le train de ballons numéro 4 n'a pas été lancé. Charles Moore et Karl Pflock reconnaissent chacun que ce journal est curieux (puzzling), contradictoire, même, admet Moore. Et il fait ce commentaire : "Une interprétation de la note du 4 juin est que le lancement prévu pour faire des mesures en vol des explosions de surface de Crary après minuit fut annulé à cause des nuages, mais que, quand le ciel s'éclaircit plus tard, la grappe (cluster) de ballons déjà gonflés fut relâchée". Moore explique que le mot grappe était utilisé aussi bien pour décrire un train de ballons qu'une simple grappe, comme ceux du projet Mogul. Détail important : Il avoue ne pas se souvenir de ce lancement de ballons. Mais il suppose qu'il devait être semblable, comme prévu, au train du vol N° 2 qui devait leur servir de modèle pour les trois premiers vols à White Sands. Il est donc probable, conclut Moore, que Crary ait bien fait un tel lancement. Et il suppose en plus que ce lancement aurait eu lieu à trois heures du matin, une hypothèse dont il a absolument besoin pour élaborer une trajectoire hypothétique jusqu'au ranch de Brazel. En fait, on le voit bien, cela ne correspond pas du tout à la rédaction de Crary : si on le lit correctement, le vol Mogul 4 n'a pas eu lieu.
Le seul fait que Moore avoue ne pas se rappeler du lancement de Mogul 4 est extrêmement révélateur. Voilà un jeune étudiant en physique, à qui on a confié un poste de responsabilité, prêt à entrer en action pour procéder au lancement d'un projet important, qui ne se souvient pas du premier lancement, à trois heures du matin !

Le Rapport technique No 1 de NYU (New York University), du 1er avril 1948, couvrant la période du 1er novembre 1946 au 1er janvier 1948, ne fait que confirmer tout cela. Commentaire dans le tableau complet des lancements :
« Vol No 5 lancé le 5 juin, composé de 26 petits ballons météo de 350 grammes et 3 ballons plus grands au sommet (lifters), d’une radiosonde et d’un réservoir de ballast liquide. Poids total 26 kg. Atterri à l’est de Roswell. Commentaire de NYU : Premier vol réussi en emportant une charge lourde. » Remarquons qu’ils avaient déjà renoncé aux cibles radar, beaucoup trop fragiles.


Extrait du tableau complet des vols Mogul selon la New York University

Voilà qui est clair : le vol No 5 fut le premier lancement réussi d’un train de ballons complet, avec instruments. Donc, pas de train Mogul 4, qui ne figure pas dans le tableau. Les sceptiques ont soutenu (certains le font encore) qu’il y avait bien eu des lancements, à White Sands, avant Mogul 5, et que ce commentaire du rapport ne prouve rien. Qu’en est-il de ces supposés vols précédents ?

Dans le Rapport de NYU du 30 avril 1947, sur les ballons à « niveau constant » (constant level), sont décrits les vols qui furent lancés sur la côte Est (pages 26, 27) :
Le vol du 3 avril 1947 correspond au numéro 1 du tableau récapitulatif des vols. C’est le premier essai de lancement Mogul complet, et c’est un échec. Le vol suivant était prévu le 18 avril, mais est abandonné à cause du vent. Les ballons déjà gonflés sont lâchés et l’équipement est récupéré. Un nouvel essai est prévu pour le 8 mai, mais le rapport du 30 avril s’arrête là. On retrouve bien un lancement cité à la date du 8 mai dans le journal d’Albert Crary, mais c’est encore un échec à cause du vent.
Il s’agit là des vols Mogul No 2 et 3, qui sont des échecs et ne figurent même pas dans le tableau complet de NYU. C’est bien ainsi, en revanche, qu’ils sont numérotés et datés dans le livre de Charles Moore (tableau, pages 78 et 79, et texte, page 80).


Extrait du tableau complet des vols selon le professeur Charles Moore. Il a rajouté les vols ratés No 2 et 3, ce qui lui permet de rajouter aussi le vol annulé No 4 !


Moore a rajouté dans son tableau les vols ratés 2 et 3, ce qui lui permet, dans la foulée, d’y ajouter le précieux vol Mogul 4, qui avait été annulé ! Pour sa part, l’armée de l’Air a mis en avant, dans son premier rapport de 1994, un lancer de ballons le 29 mai qui aurait été selon elle le vol Mogul No 3, mais c’est en contradiction flagrante, non seulement avec le rapport NYU, mais avec le livre de Charles Moore, publié trois ans plus tard. Il faut dire que Moore était l’un des auteurs du rapport NYU ! Albert Crary mentionne juste, dans son journal, le lancement d’un simple ballon pour cette date. Charles Moore explique dans son livre (page 82) que ce lancement du 29 mai n’était qu’un premier essai sans équipements, lesquels n’étaient pas encore arrivés à White Sands à cette date. Ainsi, Moore n’a pas suivi l’armée de l’Air sur ce point.

Il faut mentionner ici que le professeur Charles Moore s’est livré, dans son livre, à des calculs compliquée pour tenter de faire atterrir son mythique train de ballons Mogul 4 sur le champ de débris du ranch de Brazel. Mais d’autres chercheurs, tels Kevin Randle, Brad Sparks et David Rudiak, y ont trouvé des erreurs, notamment des manipulations des données météo, qui ont disqualifié cette tentative. Le lecteur curieux d’en savoir plus peut visiter le site web de David Rudiak (6).

3- Les vrais débris : étranges, ne ressemblant à rien de connu

Plusieurs témoins ont confirmé la découverte, par le fermier Brazel et le Major Marcel, d’un grand champ où étaient éparpillés d’étranges débris, à environ cent km au nord de Roswell, à vol d’oiseau. Ceux-ci comprenaient un grand nombre de petites pièces métalliques, découpées irrégulièrement mais très solides, rigides et légères. Il y avait aussi beaucoup de morceaux de feuilles métalliques, ressemblant à de l’aluminium mais qu’on ne pouvait ni couper, ni déchirer, et possédant une « mémoire de forme » (on pouvait les froisser mais elles reprenaient ensuite leur forme plate, sans garder aucun pli). Certaines pièces étaient poreuses, et ne pouvaient donc provenir d’une enveloppe de ballon. Certains débris ressemblaient à des baguettes de balsa, mais on ne pouvait ni les casser, ni les brûler. Selon le Dr Jesse Marcel, fils du commandant Marcel, à qui son père avait montré brièvement des débris, il y avait de curieuses inscriptions le long d’une baguette, faisant penser à des « hiéroglyphes ». D’autres pièces ressemblaient à des fibres optiques.

Tout cela suggérait qu’il y avait eu une violente explosion au dessus de terrain. Incidemment, lorsque j’avais rencontré Karl Pflock en 1995, je lui en avais fait la remarque, notant que des ballons gonflés à l’hélium ne peuvent pas exploser, et il avait fini par l’admettre avec réticence, mais il a continué ensuite à affirmer que c’étaient des débris d’un train de ballon Mogul… C’est une bonne illustration de la plaisanterie de Stanton Friedman au sujet des sceptiques qui ne veulent rien entendre : « Ne m’embêtez pas avec les données, mon opinion est faite ! »

Le dossier des témoignages sur les débris est trop gros pour être détaillé ici. Je renvoie le lecteur à mon livre Le crash de Roswell. Enquête inédite, dans lequel un chapitre entier leur est consacré. Citons juste les principaux types de matériaux:

1- des feuilles métalliques minces, pliables mais infroissables, qu'on ne pouvait ni couper ni brûler ;
2 - des pièces métalliques rigides, très nombreuses, qu’on ne pouvait ni plier, ni brûler ;
3- des morceaux minces et très solides ressemblant à du « parchemin » ;
4 - des morceaux ressemblant à de la bakélite ;
5 - des filaments transparents comme des fils de pêche en nylon ;
6 - des petites poutrelles avec des « hiéroglyphes ».

Arrêtons-nous juste sur ces fameux « hiéroglyphes ». Selon le Dr Jesse Marcel Jr, voici à quoi ressemblaient ces symboles étranges, qui ont donné tant mal à l’armée de l’Air et aux sceptiques pour les expliquer comme une confusion avec les dessins de fleurs sur le ruban adhésif renforçant les cibles radar.


Dessin des symboles par le Dr Jesse Marcel Jr


A ce propos, Charles Moore, à qui le scrupuleux Dr Marcel avait rendu visite à Socorro, a essayé de le convaincre qu’il avait vu des débris de cible radar, en lui montrant une cible qu’il avait conservée chez lui. Marcel a raconté que la discussion avait été courtoise mais brève. « Non, ce n’est pas ce que j’avais vu », lui dit-il. « Si, c’est cela que vous aviez vu ! ». Moore savait mieux que lui ! Marcel lui redit que non, et rentra chez lui, dans le Montana.

Rappel des principaux témoins sur les débris :

Quelques témoins qui disent avoir eu en main des débris :
Major Jesse Marcel ; Dr Jesse Marcel Jr ; Ms. Sgt Lewis Rickett ; Sgt. Robert Smith ; Loretta Proctor ; Bill Brazel ; Sally Strickland Tadolini ; Walter Haut ; Sgt. Homer Rowlette ; Sgt Earl Fulford.

Autres témoins sur les débris :

Barbara Dugger (petite fille du shérif Wilcox); Robert Porter ; Robert Shirkey ; Elizabeth Tulk ; Major Ellis Boldra ; Sgt Melvin Brown (selon sa fille Beverly Bean) ; Dan Dwyer (selon ses filles Frankie Rowe et Helen Cahill) ; Capt. Olivier Henderson (selon sa veuve Sapho, sa fille Mary Kathryn Groode et son ami John Kromschroeder) ; Floyd Proctor ; Lyman Strickland ; Marian Strickland ; Tommy Tyree ; shérif George Wilcox (selon sa veuve Inez Wilcox) ; Mack Brazel ; caporal Raymond Van Why.

______________________________
Notes
1. Mes deux livres sur Roswell :
Roswell. Enquêtes, secret et désinformation (2004 JMG Editions)
Le crash de Roswell. Enquête inédite (2009. Editions JMG – Le Temps présent)
2. Headquarters US Air Force, The Roswell Report. Facts and Fiction in the New Mexico Desert, 1995. Diffusé par le U.S. Government Printing Office, Washington DC.
3. Karl Pflock, Roswell : Inconvenient Facts and the Will to Believe, Prometheus Books, 59 John Glenn Drive, Amherst, New York, 2001. (trad. fr. Roswell. L’ultime enquête, Terre de brume, Rennes, 2007).
4. Charles B. Moore (avec Benson Saler et Charles A. Ziegler), UFO Crash at Roswell. The Genesis of a Modern Myth, Smithsonian Institution Press, Washington, 1997.
5. Robert Galganski, The Roswell Debris Field. An Engineer's Perspective, 2eme édition, 2002, Fund for UFO Research (FUFOR), PO Box 277, Mount Rainier, MD, 20712.
6. Site web de David Rudiak : http://www.roswellproof.com/